LA CROIX DE KERVILAINE[1]

 

 

Georges MOUSSET (SAHPL)

Belz

   

 

Signalons et apprécions une initiative heureuse participant à la sauvegarde et à la mise en valeur du petit patrimoine rural de nos campagnes.

   

Une croix ancienne dite de talus longtemps remisée et abandonnée dans un roncier est aujourd’hui sauvée et mise en évidence par le propriétaire des lieux afin qu’elle puisse être sauvegardée définitivement et admirée par tout un chacun.

Cela se passe à Belz, au village de Kervilaine (Kerevelen sur les actes du XVIIIème siècle), la croix que l’on pourrait dater du Haut Moyen Age a la particularité de comporter sur 1 face à l’intersection des bras une croix pattée inscrite en bas relief dans la pierre visible seulement sous un angle d’éclairage particulier. 

Cette croix monolithe du type palis à l’origine plantée dans un talus de la parcelle « parc er groez »  aujourd’hui rasé, est de  facture fruste, branches courtes pattées, constituée de granit clair à gros grains d’origine locale (hauteur totale de 1.80 m , largeur 0.60 m et épaisseur 0,25 m ).

Pour déjouer les personnes mal intentionnées[2], la croix est scellée dans un socle monolithe de granit monté dans la cour de la ferme.

Cette croix est semblable en tous points à celle du lieu-dit « Croix Jean » en Belz à la sortie du village en direction du village de Saint-Cado, cette dernière scellée dans un mur de clôture étant par contre dénuée de toute inscription.

 

 

        La tradition populaire attribue à l’ordre religieux bien connu des « Hospitaliers de Saint Jean » la paternité de ces croix érigées en limites des domaines possédés. En serait-il ainsi à Belz ? L’ancienne église de Belz était vouée au culte de Notre Dame, laquelle, selon E.Gilliouard, aurait été sous l’égide de l’ordre des Chevaliers Hospitaliers dont chacun connaît l’emblème distinctif à la croix pattée.

 

 

Enfin, signalons la découverte fortuite suite au nivellement du bosquet de la croix « Hospitalière » d’un ancien  calvaire enterré mais malheureusement incomplet sur ce même lieu. Ce calvaire de granit d’origine locale représente d’une manière frustre un crucifix en relief sur un fut à pans que l’on pourrait dater du Moyen Age, au revers de ce crucifix sont représentés des motifs en relief difficilement interprétables (en principe sont représentés au revers des crucifix la « Vierge et l’Enfant »). Ce calvaire pourrait être daté de l’époque du Moyen Age[3], il fera l’objet d’une restauration ultérieure par son propriétaire.

Ce sauvetage est exemplaire et symbolique, ces croix placées à escient comme des jalons dans les campagnes ont marqué les consciences paysannes. Aujourd’hui la foi pour ces croix est bien moindre, évolution des mentalités oblige, et si nous y trouvons un intérêt, c’est plutôt pour leur valeurs représentatives de cette civilisation agraire dont nous sommes tous issus.

 

 

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[1] Village en bordure de route entre le bourg de Belz et Ninézur en bordure de la rivière d’Etel (secteur de Pont Carnac ).

[2] Relevé récemment dans la revue «Archéologia » juin 2005 un article relatant la mise en place en Angleterre où les disparitions de croix sont fréquentes et deviennent inquiétantes, de puces électroniques de la taille d’un grain de riz incrustées dans ces anciennes croix de manière à pouvoir les suivre à la trace en cas de vol

[3] Voir les exemples similaires dans « Inventaire des Croix et Calvaires du Finistère » en ligne sur Internet , on y apprend notamment la « coutume » à une certaine époque de mutiler et d’enterrer les symboles religieux qui ne convenaient plus au dogme du culte (cas notamment avéré à Kersaint-Plabennec)