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 LA BATAILLE DE QUIBERON, VUE DE L'ORIENT

 

 

Paul JAN

SAHPL

 

 

Préambule : les éléments rapportés ci-après ne sont nullement une étude exhaustive, à prétention historique, mais seulement les événements qui ont concerné la ville de L'Orient pendant une courte période de deux mois : du 2 thermidor An III (20 juillet 1795), au 3è jour complémentaire de fructidor (19 septembre)

            L'orthographe et la ponctuation ont été mises sous la forme actuelle.

            Contexte

            La Convention nationale a gouverné le pays du 21 septembre 1792 au 26 octobre 1795.

La toute jeune République n'a pas encore trois ans. Elle est confrontée à des difficultés de toutes sortes, auxquelles s'ajoutent, dans la région, les chouans qui mènent des actions de guérilla et menacent l'approvisionnement en grains de la ville.

Les émigrés tentent de perturber le commerce, avec de faux assignats.  

Principaux protagonistes.

            Emigrés : comte de Pusaye – d'Hervilly – Sombreuil

            Chouans : Cadoudal

            Républicains : Municipalité (maire : le citoyen Garnier) – Conseil général - Adjudant général Lavalette – Agent national – général en chef Lazare Hoche

« Victoire des Français en 1795 » par C.N. Malapeau d'après Swebach Desfontaines

Cabinet des Estampes, in Grand Larousse.

Le paysage aurait-il changé à ce point en deux siècles?  

La flotte, sous les ordres du commodore Warren, mouille en rade de Quiberon le 25 juin. Les 3000 à 5000 hommes de la division de Puisaye débarquent le 27, tandis que les Chouans, 15000 hommes, prennent Auray, Mendon et Landévant.

La contre-offensive s'organise.    

ARCHIVES   (volume 1 D5)  

Ci-après, la chronologie des événements tels qu'ils figurent sur les registres de la ville.

              La situation justifie qu'une permanence de nuit soit assurée à la mairie.

           2 thermidor  (20 juil.; p.2) Rapport de la permanence.

          La permanence rapporte que la ville a été tranquille mais que ,depuis la pointe du jour, il a été entendu une canonnade très vive du côté de Quiberon dont, jusqu'à ce moment, elle n'a reçu aucune nouvelle officielle.

   

photo 1 4 thermidor (22 juil.; p.4) – Séance de la section du Conseil général de la commune de l'Orient en surveillance permanente, tenue le quartidi de la première décade quatre thermidor an trois de la république française une et indivisible.

Séance du Bureau.

Le Bureau se forme à huit heures précises, présidé par le citoyen Garnier, maire; - présents les citoyens Coulon et Dyough, officiers municipaux membres du Bureau

Aussi présents les citoyens Bonet, officier municipal, Trintinian et Rouleau, notables de permanence.

 

 

photo 2Prise de Quiberon.

La permanence rapporte que, sur les huit heures du matin, l'adjudant général Lavalette a fait passer la nouvelle à la municipalité que la presqu'île de Quiberon avait été prise, les chouans et brigands obligés ou de se noyer ou de passer au fil de la baïonnette.

De cette heureuse nouvelle, il s'est empressé d'en prévenir le maire, qui l'a aussitôt faite publier dans toute la commune, que les cris de vive la république se sont faits entendre, et que la joie était présente sur tous les fronts des citoyens amis de leur patrie, du bon ordre et de la tranquillité publique. Le Bureau, sur les conclusions de l'agent national, voulant perpétuer à jamais la honte des suppôts de la tyrannie, et voulant montrer aux générations futures le châtiment qui attend tous ceux qui s'armeront contre leur patrie, ordonne l'inscription au registre de ses délibérations de la lettre du général Hoche, ainsi qu'il suit:

        

 

         Lettre du général Hoche

         «  Auray le trois thermidor an trois de la république,

         « le général en chef Hoche à l'adjudant général Lavalette, commandant à l'Orient :

          Général

         « Les valeureuses troupes que je commande ont, à deux heures du matin en ce jour, emporté d'assaut le fort Penthièvre et le camp retranché de la presqu'île, dont ils se sont emparés pour faire halte n'ayant d'autre alternative que de se jeter à la mer ou d'être passés au fil de la baïonnette. La noble armée (l'armée des nobles ?) a mis bas les armes; elle arrive prisonnière à Auray, conduite par quatre bataillons; donné avis de cette opération, signé L. Hoche.

 

         Arrivée de la garde nationale.

         Sur les six heures arrive le détachement de la garde nationale, partie d'ici à la poursuite des brigands le vingt huit dernier, et amène avec lui un convoi de grains.

         Arrivée de grains. Les citoyens Patin et Célisio, commissaires nommés par la municipalité pour suivre la réquisition des grains dans le district du Faouët, arrivent aussi, et sur leur demande le Bureau des subsistances s'assemble et rend, en leur présence, compte de leur opération.

           Permanence.

          Les citoyens Bonet, officier municipal, Trintinian et Prouteau, notables de permanence, prennent le service de nuit.

          Fait et arrêté les jour et an que devant;

 

photo 3 5 thermidor (23 juil.; p.5)Détail de la prise de Quiberon.

Le district fait passer à la municipalité les détails sur la prise de Quiberon, de laquelle il semble que la conquête de cette île a été faite en deux heures de temps, que le nombre des prisonniers égale le nombre des républicains, après les avoir forcés de mettre bas les armes, que le butin fait sur eux est immense, tant munitions de guerre qu'équipements de toutes espèces, qu'enfin malheureusement le nombre des républicains qui ont péri dans cette journée est de deux cents et le double de blessés.

 

 

 

8 thermidor (26 juil.; p.6) - Distribution d'assignats faux provenant de Quiberon.

           Une foule de citoyens se porte à la commune et y apporte des assignats en grande quantité, qu'ils viennent de recevoir des militaires, et en demandent la vérification.

            Moyen d'en arrêter la circulation.

           Le Bureau, après vérification faite, les reconnaît tous pour être faux et provenir de Quiberon. En conséquence, après délibération et sur les conclusions de l'agent national, il prévient le chef de la force armée de prendre les mesures les plus promptes et les plus sévères pour retirer des soldats les assignats faux dont ils sont porteurs, et afin de prévenir toute émission de leur part et sur les conclusions de l'agent national, le Bureau fait faire une publication de la loi sur les distributeurs de faux assignats.

Toute la journée est employée à entendre les discussions des citoyens qui viennent se plaindre d'avoir reçu des assignats faux, et à les terminer conformément aux lois.

          (p. 7)Quelques millions d'assignats faux arrêtés.

           L'adjudant général Lavalette prévient la municipalité que, d'après ses désirs, il a fait visiter les sacs des militaires venant de Quiberon, et en a retiré les assignats faux qui s'élèvent à quelques millions, qu'il se propose de les faire brûler publiquement.

             9 thermidor  (27 juil.; p.7 à 8) Conseil municipal.

          Le Conseil municipal s'assemble ensuite, et délibère sur les objets du moment qui sont les mesures à prendre pour arrêter la circulation des faux assignats, dont le nombre paraît encore incalculable par la foule des citoyens qui se présentent à la commune pour les déposer et porter plainte contre ceux de qui ils les ont reçus.  

          Réimpression de la loi sur la distribution des faux assignats.

En conséquence, sur les conclusions de l'agent national, le conseil arrête de faire de nouveau réimprimer la loi sur les distributeurs de faux assignats, et de la faire publier dans tous les cantons de cette commune;

          Détail de la fête du 9 thermidor

           Le représentant du peuple Michel, ayant à côté de lui le citoyen maire, a mis le feu au bûcher préparé pour consommer deux millions et quelques cent mille livres d'assignats ... A mesure que les flammes s'élevaient et dévoraient le papier formé par le tyran de l'Angleterre, les cris de joie se renouvelaient. Les élans du patriotisme et de la joie un peu calmés, la troupe au commandement de ses chefs a défilé devant les autorités constituées et le cortège s'est remis en marche comme devant pour se rendre à la maison commune.

           28 thermidor  (15 août; p.34) Lecture des nouvelles.

            Le courrier arrivé, on fait publiquement ouverture et lecture des nouvelles.

           Arrivée de 60 prisonniers de Quiberon.

            L'on annonce l'arrivée de soixante prisonniers pris à Quiberon, escortés par un détachement. Les prisonniers conduits dans le port, le Bureau , d'après la demande du commissaire de guerre, délibère des billets de logement au détachement;

           Travail sur les subsistances.

            Le restant de la journée est employé à prendre des moyens pour assurer les subsistances à la commune, dont la pénurie extême et les difficultés de s'en procurer fait craindre la pénurie totale.

           Paix avec l'Espagne.

          A cinq heures, le Conseil général s'assemble et, à l'ouverture de la séance, sur la proposition du maire, il arrête de publier dans toute l'étendue de cette commune la conclusion définitive de la guerre entre la république française et l'Espagne, ce que les membres du Bureau font aussitôt exécuter.

30 thermidor  (17 août; p.35) Arrivée de 160 prisonniers de Quiberon.

            Sur les huit heures arrive un détachement escortant cent soixante prisonniers pris à Quiberon. Le Bureau s'empresse à lui procurer les logements nécessaires à la troupe, pour la nuit seulement, les prisonniers étant logés dans le port.

            1e fructidor  (18 août; p.35)  Loi relative aux assignats à effigie royale.

             L'agent national dépose sur le Bureau la loi du vingt trois messidor dernier, relative aux assignats à effigie de la royauté dont il requiert de suite l'enregistrement et la publication

            art. Premier. Les assignats portant des empreintes extérieures de royauté pourront pendant un mois à dater de la publication de la présente loi, être employés dans toute espèce de paiement à faire à la nation.

            (p. 36 v) Arrivée de prisonniers faits à Quiberon.

            Sur le soir, arrivée de prisonniers faits à Quiberon, escortés par un détachement. Le Bureau s'empresse à leur procurer les logements nécessaires à la troupe.  

           2 fructidor  (19 août; p.37) Arrivée d'un convoi de grains.

          Arrive ensuite un convoi de grains de la commune du Faouët, escorté par un détachement.

          5 fructidor  (22 août; p.38v) La police et la comptabilité des mesures de sûreté contre les Anglais qui sont toujours à la vue de nos côtes ont occupé le Bureau pendant la journée.

          8 fructidor  (25 août; p.40v) Arrivée de 200 prisonniers de Quiberon. Difficulté de les loger.

          Sur le soir, arrive un détachement de troupes de ligne, escortant deux cents prisonniers provenant de la prise de Quiberon. Le port s'étant refusé à les loger, le Bureau s'empresse à leur procurer asile, pour la nuit seulement, n'ayant aucun emplacement capable de les contenir plus longtemps, et délivre des billets de logement à la troupe chez les habitants, après avoir préalablement placé les prisonniers dans le local de la cidevant église de St Louis.

           11 fructidor  (28 août; p.42) Rapport sur les chouans

          Sur les six heures, divers citoyens viennent prévenir la municipalité que les chouans parcourent les environs de cette commune, et viennent dévaster et arrêter plusieurs citoyens de la ville.

         Le Bureau, aussitôt, fait prévenir le commandant de la place, qui fait partir sur le champ la compagnie des chasseurs.

       13 fructidor  (30 août; p.43) Il (le Bureau) prévient l'adjudant général Lavalette que les chouans viennent d'attaquer plusieurs personnes sur la route de Quimperlé. Il lui demande, en conséquence, s'il ne serait pas possible d'établir un poste aux Cinq chemins.

        27 fructidor  (3 sept.; p.45) Mort du citoyen Cordé juge de paix assassiné par les brigands.

         Sur les trois heures, deux citoyens provenant de la commune du Quevin viennent prévenir qu'une femme a trouvé le corps du malheureux Cordé, assassiné par les brigands.

          (p. 51) Une chaloupe de grains passant de Caudan à Kervignac, par mer, sans être munie d'acquit nécessaire.

          Le tribunal de police s'assemble ensuite, et connaît de plusieurs délits de son ressort, et renvoie quatre individus prévenus de chouannage, arrêtés par une patrouille à Keryado.

           (p. 52) Rassemblement de chouans - menaces à ce sujet.

          Différents avis étant donnés que les chouans s'assemblent et ont déjà plusieurs paroisses, pour aller intercepter le convoi de cette commune venant du district du Faouët.

          Le bureau s'occupe de suite à prendre les mesures nécessaires pour assurer l'arrivée de ce convoi, sans lequel cette commune va se trouver livrée à toutes les horreurs de la famine.

          f ructidor 3è jour complémentaire (19 sept.; p.52v) l'agent national annonce que les compagnies des grenadiers chasseurs et canonniers de la garde nationale sont parties ce matin, pour aller au devant du convoi de grains et pour éclairer la route et dissiper les attroupements des brigands dont le dessein paraît être de l'intercepter.

 

Source: Archives municipales de Lorient

 

Cette époque révolutionnaire voit l'instauration du système décimal, le 1er août 1793.

          Dans le même esprit, le calendrier subit, lui aussi, une profonde transformation, à partir du 24 octobre de la même année.

           L'année commence à l'équinoxe d'automne, le 22 septembre. Elle est divisée en 12 mois de 30 jours + 5 jours complémentaires (6 jours les années bisextiles) pour les fêtes républicaines.

 

          

     L'an I commence le 22 septembre 1792.

 

Automne 

vendémiaire

vendanges   

brumaire 

brumes

frimaire

frimas

Hiver 

nivôse

neiges

pluviôse

pluies

ventôse

vents

Printemps

germinal

germination

floréal 

fleurs

prairial

prairies

Eté

messidor

moissons

thermidor

chaleur

fructidor

fruits

 

 

Le mois comprend trois décades, par ordre :

            primidi – duodi – tridi – quartidi – quintidi – sextidi – septdi – octidi – nonidi – decadi.

 

C'est à Philippe Fabre, dit Fabre d'Eglantine, que l'on doit le nom des mois. On lui doit aussi une contribution plus durable au patrimoine national, avec « Il pleut, il pleut, bergère. »

            Compromis dans le scandale de la Compagnie des Indes, et accusé de corruption, il sera guillotiné.

            Le calendrier républicain restera en vigueur pendant treize ans, et sera officiellement abandonné le 1e janvier 1806.