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LA REDOUTE-BATTERIE[1] DE KERHONNO-LANESTER

 

Claude Le Colleter

   

Pour répondre à des interrogations des Lanestériens lors des vidéo-productions du groupe Histoire de la ville, je crois qu’il est intéressant d’apporter ces précisions.

   

       Le maillon d’un système de défense militaire construit au XVIIIème

 

       De 1747 à 1757 (il y a 250 ans) on édifie des remparts autour de la ville de Lorient et des forts et batteries  au bord du littoral, Kernével, Pen Mané, Ile Saint Michel, Fort Bloqué et  Caudan-Kerhonou.

   

Vue extérieure de la redoute-batterie

Photo C. Le Colleter

  Quels sont les faits qui ont engendré de telles décisions ?

 En voici un sommaire (sources: Le débarquement des Anglais en 1746;bulletin SAHPL 89-90)

            En 1746, Lorient a 80 ans et 15 000 habitants, la Compagnie des Indes y entretient 35 navires et y débarque et vend de précieux objets en provenance de Chine. En 1745, Dupleix est victorieux aux Indes, les grandes puissances impérialistes de l’époque dont l’Angleterre  et la France veulent établir leurs empires coloniaux. Et les Français veulent conquérir le Canada.

Les Anglais ne sont pas de cet avis et vont tout faire pour contrecarrer les initiatives françaises.

En 1746, par le biais d’une  stratégie de dissuasion et de diversion, proposition est donc faite  de se rendre au Canada pour contrer la France , mais en cours de voyage, vu la tempête, la flotte anglaise bifurque et décide d’accoster en Bretagne, au Pouldu-Guidel précisément, de façon à atteindre la ville de Lorient par la terre.

Le 28 septembre 1746 le guetteur de Lorient aperçoit  à 15 km au large 54 voiles, qui débarquent au Pouldu-Guidel le 30.

Le tocsin sonne dans toutes les églises, les signaux de feu attirent l’attention et le canon d’alarme de Lorient se fait entendre.

Toute la population a été ainsi prévenue, et à cette époque il faut imaginer un paysage local dépourvu de routes, entouré de vasières et de marécages.

 

 Les forces en présence  selon certaines estimations :

            Angleterre : 54 navires, 4500 hommes sous les ordres de l’amiral Lestock , peu de moyens logistiques, absence de chevaux…  etc

France : 900 miliciens, 400 cavaliers-dragons.

 Si les Anglais sont plus nombreux, deux problèmes majeurs vont se poser :

Le transport de l’artillerie d’autant plus que les paysans riverains  refusent une quelconque aide à l’ennemi (ils ont conduit leur chevaux et attelages à l’intérieur des terres).

Les paysans parlent bretons, les Anglais n’y comprennent rien.

            L’armée anglaise va parvenir à entrer dans Lorient, menace de faire sauter la ville  font le blocus vont  occuper Lanveur-Keroman et se ravitailler à la Fontaine des Anglais.

            La ville ….fit payer cher cette attaque : neuf cents Anglais y périrent.

En même temps, le bruit se répandant que des renforts arrivaient au secours des assiégés, le général Synclair battit précipitamment en retraite, donnant ordre de rejoindre la flotte.

Celle-ci, établie dans la baie du Pouldu, non loin de l’embouchure de la Laïta fut au moment d’y sombrer toute entière par la violence d’un coup de vent de Sud-Est, à grand peine, elle échappa au danger.[2]

 

Quelques dizaines de milliers de  miliciens français et 600 hommes des troupes régulières  rassemblés à Vannes et au Port-Louis sont prêts à intervenir.

Les artilleurs français étant efficaces, les munitions se faisant rares du côté anglais (absence de moyen de transport),ceux ci vont abdiquer le 7 octobre.

 Il faut considérer qu’à l’époque la portée utile  des canons n’excédait pas 600m.

 En échec, ils vont rembarquer sereinement les 7 et 8 octobre (les Lorientais, qui comptaient d’ailleurs se rendre à l’ennemi, sont bien contents qu’ils s’en aillent), puis ils vont piller Houat et Hoëdic.

Côté français 15 civils auraient été tués.

Côté anglais 50 furent massacrés par les paysans entre Guidel et Lorient et dans le rembarquement une chaloupe se retourna faisant 15 victimes.

Secret militaire oblige, difficile de cerner la réalité des chiffres exacts des pertes humaines même si le nombre de 900 victimes anglaises fut annoncé lors du siège, il semble que ce soit très nettement au-dessus de la réalité .

La chapelle de la Congrégation   subit quelques dégâts, notamment un boulet qui vint se planter dans la façade, boulet qui restera jusqu’en 1957, date à laquelle le Maire de Lorient Jean Le Coutaller le rendit aux Anglais lors du jumelage avec la commune de Babington (proche de Liverpool).

A l’évidence, et au vu de la fragilité des défenses terrestres, il devient nécessaire de doter les installations du port de Lorient d’un système de défense efficace.

Ce sera chose faite avec la construction de ces redoutes et la construction des remparts à Lorient qui d’ailleurs ne trouveront guère d’utilité, le XIXème siècle étant d’un calme relatif dans notre région.

Dimensions de la redoute-batterie quadrangulaire (dite aussi batterie des gardes côtes):56m x 24m.

Deux pans et demi de murailles sont encore visibles.

Une riveraine, Mme Madeleine Thomas se souvient avoir vu un boulet fiché dans l’une des murailles peu avant la guerre 39-45.

D’ailleurs le village à proximité s’appellera temporairement Kerbataille pendant le 18ème et le 19ème siècle.

Intérieur du bâtiment.

Photo C. Le Colleter

 

 

Bibliographie :

 

Le débarquement des Anglais dans la région de Lorient ; Jean Jurbert ; Bulletin SAHPL 1989-90.

 

 

v

 



[1] redoute : fort ou système de fortification consistant en un emplacement fortifié, composant des stratégies militaires de la majorité des empires européens de l’époque coloniale.(Wikipédia)

[2] Lorient, son histoire et son port,  Ch.F Aubert,  ED. du Bastion 1843