DOUZE STELES GRAVEES D’UNE CROIX HAMPEE

DANS LE MORBIHAN OCCIDENTAL

Dominique PAULET

Kerulvé - Lorient

 

 

II DESCRIPTION DES DOUZE STELES GRAVEES

2ème Partie

Kergonan Plouharnel
Locoal Landaul
Saint-Jean-Brévelay Plumergat

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I - Présentation générale
III - Tentative de classement typologique et chronologique

 

 

 

 

II.7. Stèle de Kergonan

 

            A la sortie du bourg de Baud, direction Locminé, on peut entrevoir cette pierre dressée dans un parc privé. Elle se tenait autrefois près de la fontaine de Kergonan, en Languidic ; cette commune contient beaucoup de stèles de l’Age du Fer : l’inventaire de Daniel Tanguy en dénombre 45, celle-ci étant, parmi les plus grandes, la plus élancée.

            Le dessin général de la gravure est voisin de celui examiné juste ci-avant sur la stèle de Kervily qui se tenait dans la même paroisse. La hampe est plus allongée, peut-être en fonction de la hauteur disponible du support ; à noter ici un léger élargissement en pied de hampe, allusion à une croix-monument plutôt qu’à une croix de procession ? Les contours des bras de la croix sont très curvilignes. Enfin l’ensemble du motif est gravé proprement en creux.

            Il n’y a pas d’inscription, et ce n’est pas faute de place de chaque coté de la hampe.

 

II.8. Stèle de Locoal

            Actuellement située au milieu de la presqu’île de Locoal (commune de Locoal-Mendon), adossée à une clôture de jardin au Sud de l’église, cette stèle a du être légèrement déplacée. Elle est considérée10 comme ayant marqué la limite entre le territoire relevant de l’abbaye de Redon à Locoal et le Sud de la presqu’île dit « La Forest » détenu par des Normands à la fin des guerres de reconquête contre ceux-ci.

            Une des faces de cette pierre classiquement taillée (hauteur 1,5 m) porte une croix pattée bien visible. La croix est sculptée en relief à l’intérieur d’un cercle ; la hampe qui la prolonge est fort courte, terminée en arrondi. L’apparence de l’ensemble fait penser à un style pré-roman correspondant bien à l’époque de la fonction qu’on lui affecte.            Il semble raison-nable d’attribuer la mise en œuvre de la stèle de Locoal au Xème siècle.

           Une croix pattée est inscrite dans un cercle, suivant le même procédé de gravure, au milieu d’une croix taillée fort ancienne, à Plogonnec ( Atlas des croix du Finistère4, p.195).

 Une dalle porte aussi un motif de ce type, hampé, parmi les ruines d’une église romane primitive (monastère de St Paul Aurélien) à l’île de Batz.

 

II.9. Stèle de St Jean Brévelay

            La chapelle du Moustoir est située à environ 4 km au Sud du bourg de Saint-Jean-Brévelay ; à coté de la chapelle, un doigt de pierre se tend vers le ciel. Il lui est donné ici le nom de la commune plutôt que celui, trop banal, du lieu-dit. La stèle n’est pas parfaitement régulière, sa section se réduit partiellement en arrondi en allant vers le haut, si bien qu’on a pu la considérer comme un menhir de l’Age du Bronze.

 

         Le motif qui orne amplement la face la plus plane est du type rencontré sur les stèles de Kervily §II.6 et de Kergonan §II.7 : hampe large et longue, à bords parallèles. Mais nous sommes en présence d’une autre technique de gravure : incision de contour au simple trait. Pas d’épigraphe qui aurait permis éventuellement un classement chronologique des trois sœurs.

            La hampe repose visiblement sur un support ; c’est l’image d’une croix-monument plus que d’une croix de procession. Au point que Louis Marsille11 a jugé « que nous avons le droit de regarder cette gravure comme une reproduction, au trait, de la première croix taillée et de considérer comme croix les plus anciennes celles qui s’en rapprochent le plus ». En somme un dessin en accompagnement de la fabrication en trois dimensions de croix à branches égales montées sur fût. Marsille cite la croix de Coët-a-Tous en Carnac. Il existe cinq ou six croix en pierre taillée de forme grecque sur haut piédestal dans le Finistère, aucune ne semble remonter au haut Moyen Age. Il est plus raisonnable de penser que la figuration de notre stèle s’inspire de modèles en bois.

 

II. 10 Stèle de Plouharnel

Les touristes venus observer le panorama du haut du tumulus Saint Michel à Carnac ne se doutent pas toujours que le support de la table d’orientation qu’ils utilisent est une des plus belles stèles de l’Age du Fer. Partant d’une base parfaitement carrée, ses arêtes chanfreinées se rapprochent harmonieusement vers le sommet. Cette pierre a été déportée depuis l’emplacement qu’elle occupait au bourg de Plouharnel, en bordure de la route de Carnac, peu après 1930.l

           La hauteur de la stèle sous la table est de 1,37 m.

            Les gravures qu’elle porte sont assez peu visibles. Sur une des faces apparaissent des lignes formant des triangles ou des trapèzes, peut-être une ébauche de croix mal partie dans son tracé et reprise sur une autre face où figure une grande croix pattée gravée au simple trait. Le trait cerne aussi une hampe devenant à son pied presqu’aussi large que les bras de la croix. La hampe est proportionnellement courte : 37 cm alors que la croix mesure 64 cm.

 

 

 

 

II.11. Stèle de Landaul

            Cette stèle accompagne un if séculaire sur la place de l’église de Landaul. D’allure basse, de forme trapézoïdale, elle est relativement plate, comme une dalle dressée.

            Sur trois de ses faces sont gravés quelques traits verticaux et horizontaux, entourés d’une ligne fermée à l’apparence d’écusson. Rien de semblable à nos croix pattées ; des confrontations à d’autres images sont à rechercher. Viennent d’abord à l’esprit les fortes nervures qui ornent souvent les couvercles de sarcophages mérovingiens : une barre longitudinale et deux ou trois barres transversales.   

            Il ne faut pas hésiter à considérer ces tracés comme très anciens, de l’époque des pérégrinations des moines celtiques, aux environs du VIème siècle.

Une autre inspiration est peut-être plus voisine, celle des graffitis sur dalles du Pays de Galles12 (ci-contre à droite) ; de la même lignée, les gravures de Locuon en Ploërdut (ci-contre à gauche, ‘‘autel’’ remisé dans l’église).

Tout autre est la quatrième face de la stèle de Landaul. Y figure une croix caractéristique à hampe courte, gravée au trait.

 

II.12. Stèle de Plumergat

            Modeste par sa taille (hauteur 0,9 m), la pierre de Plumergat a fait l’objet de nombreuses études à propos de l’inscription gauloise, exceptionnelle, qui emplit la face opposée à la gravure de croix. Placée près de l’église du bourg, si bien nettoyée qu’elle peut être jugée trop décapée, elle siégeait autrefois dans l’ancien cimetière à proximité. Des auteurs l’évoquent comme un symbole de continuité d’accompagnement funéraire de l’Age du Fer presque jusqu’à nos jours, ce qui est peut-être exagéré ; la paroisse de Plumergat est cependant de fondation ancienne.

 

La croix est du modèle à hampe courte. Elle est réalisée en creux mais, compte tenu de sa petite taille, on ne voit pas comment elle aurait pu être gravée au trait ; il n’y a pas lieu de la distinguer des autres croix à hampe courte pour cette différence technique.

          

            L’inscription verticale à coté de la croix a été analysée par le CIPS sous la référence M8. La datation envisagée s’étale sur une longue période, et il n’est pas certain qu’elle soit contemporaine de la croix. En supposant une époque tardive pour l’une et l’autre, ce serait au plus tard le Xème siècle.

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