.

Page précédente Accueil Plan du site

 

ANALYSE D’UN TYPE PARTICULIER DE SITE DÉFENSIF

INTERMÉDIAIRE ENTRE LES MOTTES FÉODALES

ET LES PREMIERS CHÂTEAUX-FORTS

 

D. Paulet et L. Goulpeau

 

Le Rocher Royal à Guidel
Le Rocher du Corbeau à Pont-Scorff
Kerlivio à Cléguer
Kervran à Meslan
Saint-Adrien à Arzano
Coh-Castel à Bieuzy-Lanvaux

(1) Voir aussi l'article de Philippe Belbéoc'h 

 

 

Depuis sa création il y a deux ans, le Groupe de travail sur l’Archéologie du Haut Moyen Âge de la S.A.H.P.L. s’est proposé dans un premier temps de visiter (ou de revisiter) de nombreux sites défensifs terroyés existant dans un rayon plus ou moins large autour de Lorient (jusqu’à une cinquantaine de kilomètres pour certains d’entre eux). Notre idée était (et reste encore) d’essayer de dégager de grandes catégories en recherchant des convergences sur des bases tant typologiques que d’implantation géographique ou environnementale. Trouver pour ces grandes catégories des indices en vue d’un classement chronologique ultérieur restait au niveau de cette prospection une vue un tant soit peu utopique compte-tenu des nombreux amateurs éclairés qui se sont, par le passé, frottés à ce problème.

.

À côté des classiques éperons barrés (protohistoriques pour la plupart) [Kergastel-Saint Maurice en Clohars-Carnoët (29), Saint-Adrien en Arzano (29), Sainte-Anne en Plouay (56)], des enceintes ovalaires ou sub-circulaires [Botalec-Botcourio en Landévant (56), Camp des Rouëts en Mohon (56), Camp du Passage en Quimperlé (29), Berluhec en Rédéné (29)] (datées des VIIIème-IXème siècles pour certaines d’entre elles), des mottes féodales [Moulin du Roch en Arzano (29), Vieux-St Yves en Bubry (56), Coët Magoer en Pluvigner (56), Sainte-Anne en Plouay (56)], nous pensons avoir isolé un type de site assez particulier que nous verrions assez bien situé chronologiquement entre les mottes féodales et les premiers châteaux-forts.

La plate-forme centrale de la motte féodale classique domine les sols environnants parce que réalisée par exhaussement à l’aide de terres rapportées, en partie extraites d’un fossé qui en délimite le pourtour. Par opposition, le type de site sur lequel nous souhaitons attirer l’attention du lecteur se présente plutôt comme une plate-forme découpée en haut d’un fort dénivellé naturel (généralement crête militaire surplombant une vallée) à l’aide d’un profond fossé en demi-cercle qui débouche directement dans la pente. La plate-forme ainsi isolée, dont le diamètre peut atteindre 30 à 35 mètres ne fait plus saillie par rapport à l’environnement mais se noie dans le profil du côteau où elle est taillée.

Côté vallée, l’abrupt de la pente [parfois une falaise comme à Pen-Mané en Pont-Scorff (56) ou à Saint-Adrien en Arzano(29)] assure une protection naturelle et dégage les vues en amont et en aval de la rivière qui coule en contre-bas ainsi que sur le territoire en vis-à-vis. Côté terre, la protection est assurée par la profondeur du fossé en demi-lune qui peut atteindre 7 à 10 mètres [comme au Bois du Rocher Royal en Guidel (56) ou à Coh Castel en Pluvigner (56)]. Le bord extérieur du fossé peut être ou non doublé par un talus Par contre la plate-forme elle-même ne semble pas faire relief dans l’environnement (à l’exception éventuelle des superstructures qu’elle peut porter) et s’adapte parfaitement dans le paysage [Bois du Rocher Royal en Guidel (56), Keruran en Meslan (56) ou Pen-Mané en Pont-Scorff (56)]. Cet aspect est particulièrement perceptible lorsqu’on aborde le site du Bois du Rocher Royal en Guidel (56) par l’arrière sur le haut du côteau et à travers bois. Brusquement, on débouche au-dessus du profond fossé et alors seulement on découvre la plate-forme en face.

Dans leur conception, ces sites fortifiès (qui ont d’ailleurs pu évoluer eux-mêmes pour s’adapter aux nécessités de la défense) préfigurent à échelle plus modeste certains châteaux forts comme Spinefort en Languidic (56) où on retrouve cette même utilisation du terrain (rebord de côteau du Blavet découpé à la convergence de deux affluents) avec un espace isolé sur la crête militaire par un très profond fossé (plus de 10 mètres) presque circulaire et faiblement continué dans la pente, même si la surface défendue possède une toute autre échelle (plusieurs dizaines de mètres de diamètre). Considérés de cette façon, ces sites apparaissent d’une part comme intermédiaires entre les mottes et certains châteaux et d’autre part comme des sites d’appoint dans un système défensif plus vaste.

 

Bien évidemment, les contraintes liées au terrain entraînent de multiples variantes autour de ce prototype et dans la réalité la plus ou moins bonne conservation des sites rend leur lecture parfois peu évidente d’autant que nombre de ceux-ci se retrouvent aujourd’hui dans des espaces boisés et que souvent la présence de souches ou d’arbres abattus n’est pas sans perturber les structures demeurées en place. Malgré toutes ces réserves, nous pensons avoir isolé une demi-douzaine de ces sites (4 sûrs et 2 possibles) qui répondent de plus ou moins près au prototype théorique décrit ci-dessus. C’est en commençant par ceux qui sont les plus proches du modèle que nous les décrirons sommairement en annexe.

Maintenant, si on souhaite étendre l’étude de telles structures défensives terroyées à un secteur géographique plus large, il pourra être intéressant de prospecter sur les sites de "Lannuzouarn" en Plouénan (29) ou de "Ar Chastellic" près de Brenot en Dirinon décrits dans l’inventaire des "Fortifications médiévales du Finistère" par Patrick KERNEVEZ, ou vers le site de "Kerhervé" en Ploubezré (22) [inventaire des "mottes médiévales des Côtes d’Armor" par Stéphane HINGANT]. Ces trois sites présentent, d’après les descriptions sommaires données dans ces inventaires, certaines des caractéristiques précisées plus haut. Toutefois, une reconnaissance sur le terrain sera indispensable avant de les ajouter à ceux déjà recensés dans le Morbihan. D’autant que pour ce département, il sera souhaitable d’étendre notre recherche vers le nord-est et le sud-est. Mais il est important de remarquer, avant toute chose, la rareté relative de ces sites défensifs à douve partielle ou interrompue dans la pente (moins de dix sur l’ensemble de la Bretagne à comparer aux nombreuses dizaines de mottes féodales ou d’enceintes ovalaires).

 

  Il s’agit maintenant de rechercher la logique qui a pu présider à l’installation de tels sites pour tenter d’en dégager la fonction. La première remarque est qu’il s’agit (sauf pour Coh-Castel) de sites de hauteur situés en rebord de plateau et dominant un profond talweg où coule une rivière côtière importante (Laïta ou Ellé et Scorff).

La fonction peut alors être envisagée de trois manières :

a. surveillance de la vallée avec éventuelle position de blocage d’une intrusion venant de l’aval (donc de la mer). On serait alors en présence d’un point fortifié verrouillant une remontée indésirable vers l’intérieur (réminiscence des invasions normandes dans un passé proche) comme par exemple à une autre échelle pour le choix du site de Châteaulin sur l’Aulne. Le site pourrait alors être inclus dans un système plus vaste de défense et avoir été voulu par une autorité unique et de rang important.

b. surveillance du territoire en face afin de prévenir un éventuel conflit de voisinage. Mais cette logique de forteresse-frontière qui peut être envisagée pour le Bois du Rocher royal (1), pour Saint-Adrien (5) ou pour Keruran (4) (sur l’alignement Laïta-Éllé) suppose une période conflictuelle entre comté de Cornouailles et comté de Vannes (ou Broërec) resserrant les possibilités chronologiques. A titre d’exemple, les vues du site de Keruran (4) face au Stêr Laër (confluent de l’Inam) s’étendent vers l’ouest sur près de deux kilomètres et vers l’aval de l’Ellé sur près de 3 kilomètres jusqu’au moulin Julien. Par contre, une telle logique se comprend plus difficilement pour les sites de la vallée du Scorff qui sont situés de part et d’autre de celle-ci, d’autant qu’elle n’a pas eu cette fonction de frontière (c’est le Blavet qui a constitué l’autre limite de la châtellenie d’Hennebont).

c. surveillance ou contrôle ponctuelle d’un site ou d’un axe de transport ( croisement entre itinéraire terrestre et cours d’eau, pêcherie ou moulin par exemple). Mais pour que la protection soit efficace, le site défensif doit se trouver à proximité immédiate du lieu à défendre (comme dans le cas du moulin du Roc’h avec la motte associée). Ce ne saurait être le cas ni de Saint-Adrien (5) ni du Rocher du Corbeau (2) où les délais d’intervention seraient prohibitifs. Par contre cette logique pourrait être avancée dans le cas des moulins de Saint-Yves et de Leslé pour Kerlivio (3) ou dans le cas du contrôle du trafic sur la Laïta pour le Bois du Rocher Royal (1).

 

  On voit qu’en réalité, il est difficile d’avancer une logique unique fonctionnant pour tous les sites et donc d’imaginer une volonté stratégique mûrement organisée par une seule autorité. Parce que, c’est là que le bât blesse. Aux XIème – XIIème siècles, l’autorité du pouvoir central n’était pas diluée au point que tout un chacun pouvait prendre l’initiative de construire de tels sites fortifiés. Il a fallu l’aval d’une autorité supérieure (généralement comte ou évêque) pour que progressivement quelques proches de ceux-ci prennent suffisament d’indé-pendance pour organiser les premières châtellenies dans le courant du XIème siècle. Puis il a fallu encore quelques décennies pour que ces derniers autorisent ou chargent certains de leurs milites de créer des points fortifiés de défense servant leurs intérêts (logique de défense de la châtellenie à ses limites ou d’occupation du terrain aussi bien que perception de droits sur gués, ponts ou moulins). Il faut donc retenir des dates au plus tôt fin XIème - début XIIème pour la réalisation des sites étudiés ici et plus vraisemblablement dans le cours du XIIème siècle. Alors, y a-t-il antériorité des mottes classiques ou simultanéïté entre celles-ci et le type de site décrit dans cet article (c’est alors le seul choix du terrain qui ferait la différence) ? Il est difficile de trancher d’une part parce que les constructions risquent de s’être étalées dans le temps et d’autre part que les fonctions étant probablement différentes (la simple occupation du territoire relevant plutôt des mottes classiques et la défense des limites des diverses entités territoriales plutôt affectées aux sites de hauteurs) les réalisations ont pu être effectuées dans un même laps de temps. Quoi qu’il en soit, il semble bien que toute cette catégorie de site soit au mieux en extrême limite du Haut-Moyen-Âge.

 

 

Annexe

1.Bois du Rocher Royal en Guidel (56)

[carte IGN 0720 ET – coordonnées UTM-WGS84 (X=461,660 ; Y=5298,930)]

  Le site se trouve sur la rive gauche de la Laïta où il domine de 15 à 20 mètres un méandre qui serpente entre le Pré Royal et le Pré de la Véchen. Il se trouve juste au-dessus de la confluence d’un ruisseau, déversoir naturel de la fontaine de Notre-Dame de Baupros. Ce ruisseau s’écoule au fond d’un vallon assez encaissé qui aujourd’hui sert sur une partie de son cours de limite entre les départements du Morbihan et du Finistère.

  Un fossé en demi-cercle, profond de 5 à 7 mètres et débouchant dans la pente, découpe dans le sommet du coteau un espace en demi-lune. Le rebord externe du fossé n’est marqué par aucun talus, par contre des restes de parements de pierre sont visibles par endroits sur le haut des parois du côté interne. Ils ont parfois été interprètés comme les bases des tours d’une enceinte (peut-être 4 ou 5 tours) mais ceci reste à vérifier par la fouille car ce peut n’être qu’un renfort destiné à stabiliser les terres dans la pente et constituer un ajout tardif.

  La plate-forme est large en façade d’une trentaine de mètres pour une profondeur d’une quinzaine environ. Elle est bordée en périphérie au dessus du fossé (mais pas au-dessus de la pente vers la Laïta) par un fort bourrelet (peut-être reste d’un mur éventuel). Elle porte en son centre, noyées dans la végétation rase et perturbées par les souches de nombreux arbres, les bases (une ou deux assises au plus) d’une structure maçonnée rectangulaire d’une dizaine de mètres de long. Là encore, seule la fouille pourrait permettre de préciser la nature et la fonction de cette structure et de déterminer si elle est d’origine ou ajoutée dans un second temps.

  Les vues sont bien dégagées tant vers l’amont que vers l’aval (hormis les branches des arbres en saison) et une fonction de surveillance depuis ce site tant de la vallée fluviale que des débouchés de la forêt de Carnoët en face peut être envisagée.

 

(1) Voir aussi l'article de Philippe Belbéoc'h 

 

°

 

 

 

2.Le Rocher du Corbeau en Pen-Mané à Pont-Scorff (56)

[carte IGN 0720 ET – coordonnées UTM-WGS84 (X=470,800 ; Y=5296,300)]

  Le site est localisé sur la rive droite du Scorff, près du lieu-dit Pen-Mané et à quelques mètres en aval d’un à-pic appelé "Rocher du Corbeau" bien localisé sur la carte IGN 0720 ET. Vers Saint-Urchaud en amont, la vue sur la vallée du Scorff et sur l’étranglement entre les hauteurs des bois de Pistol (53 mètres) et de Kerleau (44 mètres) est parfaitement dégagée sur près de 1,3 kilomètre, le site étant pratiquement dans l’axe du talweg et dominant la rivière de plus de 20 mètres. Vers l’aval, la vue sur le cours du Scorff s’étend moins loin (400 mètres), la rivière s’incurvant vers la droite est rapidement masquée par le flan du coteau. Une mission de surveillance de la vallée du Scorff est pleinement compatible avec la topographie du site.

  Un fossé en demi-cercle profond de 3 à 4 mètres et bordé côté intérieur d’un talus plus ou moins net découpe en sommet de l’à-pic un espace semi-circulaire d’une bonne vingtaine de mètres de diamètre. Cet espace n’est pas plat mais, dans la mesure où la végétation en taillis permet de l’apprécier, la partie proche de l’à-pic semble en contre-bas de celle située en arrière probablement réhaussée par le rejet des terres du fossé. On aurait ainsi une sorte de plate-forme en arrière d’une zone plus basse. L’état de conservation des lieux n’est pas très bon (taillis avec enchevêtrement de branches mortes) et un relèvement métré en plan et en coupe permettrait certainement une meilleure compréhension de l’organisation du site.

 

 

 

@

 

 

3.Kerlivio en Cléguer (56)

[carte IGN 0720 ET – coordonnées UTM-WGS84 (X=470,750 ; Y=5299,025)]

  Ce petit retranchement est situé sur la rive gauche du Scorff, à un peu plus d’un kilomètre en amont de Pont-Scorff et presqu’à l’aplomb du moulin de Saint-Yves. On y accède depuis la D113 par un virage à gauche assez serré situé juste avant Pont Person et qui conduit à un parking situé côté Cléguer du Scorff. À partir de ce parking un étroit sentier qui grimpe à flanc de côteau vers l’aval permet d’accéder au site.

Un fossé en arc de cercle, assez peu profond (parce qu’en partie comblé) et débouchant dans la pente vers l’amont et dans un talweg latéral vers l’aval, découpe un espace d’une quinzaine de mètres de diamètre qui surplombe la rivière d’environ vingt mètres. Sans être verticale, la pente est assez prononcée pour assurer la défense efficace face à la vallée. L’espace ainsi délimité est bordé par un net bourrelet (reste d’un éventuel talus), boisé mais trop perturbé pour tenter d’y reconnaître des structures bâties éventuelles.

Situé en aval et à proximité du débouché d’un ruisseau ainsi que dans une courbure serrée de la rivière, l’emplacement ne permet pas des vues dégagées ni vers la vallée ni sur les côteaux faisant face. La fonction de guet paraît donc douteuse et nous songerions plutôt à la protection rapprochée d’une série de moulins (moulin de Saint-Yves, moulin du Leslé) donnant lieu à perception de droits, voir éventuellement d’un passage à gué du Scorff.

 

 

 

 

 

 

 

**

 

 

 

4.Kervran en Meslan (56)

[carte IGN 0719 O – coordonnées UTM-WGS84 (X=464,525 ; Y=5316,525)]

  Le site de Kervran surplombe la rive est de l’Ellé en face du confluent avec l’Inam à 3 km au SSE du Faouët. Son accès n’est pas aisé parce que d’une part il se situe à 300 mètres du plus proche chemin d’accès praticable et que d’autre part il est localisé entre deux vallons profonds perpendiculaires à la vallée de l’Ellé.

  Il fait face à l’ouest en laissant sur sa gauche un vallon, brève échancrure bourbeuse de la ligne de hauteur, et à sa droite une profonde dépression avec un ruisseau. Un fossé en demi-cercle s’arrêtant dans la pente, profond d’environ 2 à 3 mètres sur son côté externe et 3 à 5 mètres sur sa face interne , découpe une plate-forme en demi-lune légèrement surélevée par rapport au sol du bois environnant. Celle-ci a un diamètre d’une trentaine de mètres et son bord extérieur est marqué par un bourrelet (reste éventuel d’une probable enceinte de pierres dont on peut détecter par endroit des restes du parement) avec, côté plate-forme, des renflements marquant probablement l’emplacement de tourelles (peut-être au nombre de 3). Dans l’angle sur-ouest de la plate-forme, une surélévation rectangulaire d’environ 1,60 mètre de haut et une dizaine de mètres de côté marque l’emplacement de la tour.

  Depuis le site, on domine la vallée de l’Ellé d’une bonne trentaine de mètres en haut d’une pente assez raide pour dissuader de toute attaque par ce côté. Les vues (hors végétation actuelle) sont très bien dégagées vers l’aval (~3km jusqu’au Moulin Julien) et plein ouest (au-delà du Quinquis et Guernalez). Au nord-est, le village et la chapelle de Saint-Fiacre sont parfaitement identifiables.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

*

 

 

5.Saint-Adrien en Arzano (29)

[carte IGN 0719 O – coordonnées UTM-WGS84 (X=462,725 ; Y=5304,725)]

  Le site de St-Adrien est plus difficile à lire parce qu’il correspond sur une même zone restreinte à la superposition probable de plusieurs types de lieux défensifs réalisés à des époques différentes et donc avec réutilisation. D’un point de vue topographique, il se présente globalement comme un éperon s’engageant dans un méandre de l’Ellé en descendant progressivement depuis un sommet boisé situé à l’extérieur de celui-ci (altitude : 76 mètres) et en retrait par rapport au cours de la rivière (distante à vol d’oiseau de 200 mètres environ). Cet éperon se termine au niveau de l’isthme par une falaise (près de 30 mètres de haut) sur tout son flan gauche et à la pointe (la rivière étant à cet endroit à une altitude de 14 mètres).

  En arrivant sur le site par un chemin forestier depuis le hameau de St-Adrien (distant de près d’un kilomètre), on rencontre d’abord un talus (peu élevé) interprété comme ayant appartenu à la première ligne de protection d’un éperon barré (peut-être protohistorique). À partir de là, le terrain s’abaisse assez rapidement vers la pointe avec peut-être des paliers plus ou moins marqués. Mais la partie qui nous intéresse ici se situe à la pointe de l’éperon où un profond fossé en arc de cercle et qui débouche dans la paroi isole à l’extrémité un espace restreint nettement surélevé où certains ont cru reconnaître la base d’une tour.

  Aujourd’hui l’état du site, très bouleversé par de nombreux arbres abattus, laisse un peu dubitatif quant aux structures exactes existant sur le site. Mais il faut quand même reconnaître que les vues que l’on peut découvrir depuis ce balcon sur la vallée de l’Ellé, tant vers l’amont que vers l’aval (sur plus d’un kilomètre dans chaque direction), en font un poste de guet ou de surveillance sans égal. De même les vues sur le méandre en contre-bas et sur le moulin du Fourden sont imprenables. Mais, est-ce suffisant pour conclure ? D’autant que les hauteurs situées en face étant presque plus élevées la surveillance serait nettement plus illusoire vis à vis d’un ennemi arrivant de Cornouailles par Tréméven plutôt que par la vallée (hypothèse d’un site de frontière).

 

 

 

 

 

 

 

6.Coh-Castel en Bieuzy-Lanvaux à Pluvigner (56)

[carte IGN 0820 E – coordonnées UTM-WGS84 (X=504,500 ; 5294,300)]

  Ce dernier site diffère des précédents par la topographie générale puisqu’il ne s’agit plus d’un site de hauteur. D’autre part il est plus proche de l’idée qu’on peut se faire d’une motte féodale que ceux étudiés plus haut. Situé sur la D16 qui le coupe (en le déteriorant évidemment) et à l’entrée occidentale de Bieuzy-Lanvaux, le site de Coh-Castel est en bordure de la vallée du Loch qu’il surplombe.

  Depuis l’extérieur jusqu’à la butte centrale, on rencontre successivement :

- un fort talus de 4 à 6 mètres de haut dans ses parties les mieux conservées,

- une douve très profonde en cercle ouvert vers le Loch (ennoyable car à niveau inférieur),

- une forte motte centrale (ø~20m) avec un dénivelé de plus de 10 mètres avec le fossé,

- une éminence haute de 3 à 4 mètres en bordure de ce dernier replat.

  Mais l’ensemble ne donne cependant pas l’aspect d’une motte isolée dans le paysage parce que découpé dans le rebord d’une avancée du côteau bordant les bas-fonds humides où s’écoule le Loch il se noie dans l’ondulation naturelle du paysage. C’est plus le côté boisé qui attire aujourd’hui le regard.

 

Le Groupe Haut-Moyen-Âge de la S.A.H.P.L.