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L’INCENDIE DE LA  VOILERIE DE L’ARSENAL DE LORIENT

(21 AVRIL 1793)

 

Lucien Le Pallec

UTL /PL

 

 Le 21 avril 1793, vers huit heures du soir, alors que le conseil municipal qui avait siégé toute la journée et établi une permanence pour la nuit s’apprête à se retirer, on annonce qu’un incendie vient de se déclarer dans le port. Après avoir donné les ordres et fait battre la générale, le conseil municipal se déclare en permanence et se divise en sections pour diriger les secours. Toute la nuit des patrouilles à la recherche d’éventuels incendiaires parcourent la ville et  arrêtent divers individus qui sont  relâchés le lendemain. L’incendie qui s’est déclaré dans les combles de la voilerie du port et où sont entreposées les bâches et les voiles du vaisseau « l’Audacieux » en armement dans le port, a atteint le magasin général sur  toute la  longueur du bâtiment qui borde le côté est de la place d’armes (rampe de la chapelle). Le sinistre se développe rapidement et gagne le toit. Bientôt le bâtiment s’embrase et la caserne des matelots, le bureau des armements, des agrès et apparaux (cordages, appareils de manœuvres) de la Compagnie des Indes, les archives de l’ancienne Compagnie ainsi que les bureaux Arnoux dont les chantiers sont établis « au Blanc » (rive droite du Scorff, près de l’actuel  pont de chemin de fer), sont la proie des flammes. A l’appel du tocsin sonné de l’église Saint Louis et de la chapelle du port, tous les gens des quartiers environnants ont accouru pour faire la chaîne et combattre le sinistre  dans une odeur de goudron et de vernis brûlés. La violence de l’incendie, attisé par un vent du nord-est fait craindre que les flammes qui lèchent les arbres de la place d’armes ne s’étendent à la corderie située sur le côté ouest de la place.

LORIENT - Panorama de l'Arsenal - L'emplacement de la voilerie est indiqué par la flèche

 La direction du vent permet de sauvegarder la tonnellerie et la menuiserie situées au nord-est. Trois grands corps de bâtiments seront ainsi la proie des flammes dont celui le plus nord d’où est parti le sinistre  et où étaient entreposés au rez-de-chaussée « les pompes, ustensiles et manœuvres pour empêcher la progression des incendies ». Le feu ne sera circonscrit qu’au bout de trois jours. L’enquête concernant le sinistre ne put établir s’il s’agissait d’un accident ou d’une malveillance.  Dans leur rapport  à la Convention, le citoyen Maire et le procureur de la commune signalaient le danger de la corderie (située à l’entrée de la porte principale) « Nous croyons devoir vous observer que l’emplacement de la corderie est on ne plus dangereux pour la ville n’en n’étant séparée que par une rue de 30 pieds de sorte qu’hier si avec les vents nord-est cet atelier eût brûlé la ville était forcément détruite. Il nous paraîtrait instant de transporter dans un lieu plus isolé cet établissement et nous vous prions de vouloir bien ordonner ce changement ou au moins favoriser la démarche que nous en ferons. Nous avons un endroit très propre qui longe la mer et qui par conséquent dans un accident, ne mettrait pas la ville en si grand danger. Dans sa séance du 26 avril  le conseil municipal prit une délibération relative au changement du local de la corderie. Cette délibération fut transmise au ministre de la Justice le 1er mai, mais demeura sans suite.

            Devant le devis exorbitant (3.152.000 livres), on renonça à la reconstruction des bâtiments du magasin général et les voûtes des caves qui devaient servir de fondations aux nouveaux bâtiments, détériorées par les infiltrations d’eau de pluie furent arasées en 1805. De petits locaux furent construits à leur place et répartis entre les différents services de l’arsenal.      Les magasins généraux dont la façade donnait sur la rampe de l’Amiral et  dont les caves servirent d’entrepôts pour six mille caisses d’or des banques belges et polonaises en juin 1940, avant leur évacuation ont été détruits pendant la seconde guerre mondiale. Après la guerre, la caserne des marins-pompiers et le service des approvisionnements aux marins (SAM) furent construits à la place, et la direction du port aménagea le reste des lieux en un parc d’ancres et de chaînes. Seules restent les pierres qui bordent les rampes de l’Amiral  et de la chapelle, vestiges de ces bâtiments construits en 1733 et qui furent les témoins de 210 années de la vie maritime lorientaise.