TOPONYMIE ET HISTOIRE

LES NOMS DE LIEU DE PLUMERGAT

(2ème Partie)   Gilbert BAUDRY

 

Société d’Archéologie et d’Histoire du pays de Lorient

 

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Hydrographie, Peuplement, Toponymie Le thème de la végétation Mots liés à l'agriculture et l'élevage
Le sous-sol et le sol L'arbre
Le relief Le bois

Faux-amis et Mystères

Les hauteurs La lande

La persistance du mystère

Rivères, étangs, ruisseaux et lieux humides Le chêne, le buis, l'aulne, le frêne

Les lieux anciens

Gués, traverses; Ponts et Moulins Le genêt, le saule, le sureau, le poirier

Conclusion

 

La Géographie précède l’Histoire et souvent l’explique

Ce sont les cours d’eau qui, pour la plus grande partie, délimitent la commune de Plumergat et, avant elle, la paroisse. Partout, y compris à l’échelle des Nations, les obstacles naturels ont facilité une défense plus efficace des territoires contre les envahisseurs : en Bretagne,les Romains, les Francs et les redoutés Vikings.

Il est possible qu’une organisation celtique, inspirée par les mêmes principes militaires se soit exercée dans les mêmes limites du pays vannetais.

Au sud, le relevé d’altitude met en évidence la faiblesse de la pente, facteur favorable aux charrois, propice au commerce, à tous déplacements civils ou militaires ; la voie qualifiée de romaine eut vraisemblablement un tracé bien antérieur à la présence des admi-nistrateurs de l’Empire.

Le caractère excentré du bourg et de l’église paroissiale semble résulter de l’intersec-tion des voies antiques de communication (voir Brech ou Brandivy). A l’époque féodale, c’est encore la géographie des lieux qui a déterminé l’emplacement du vieux Chastel au bourg, ceux de Coëtsal et de Treulan aux extrémités de la voie romaine, là où le Loch et le Sal étaient franchissables, facile à contrôler et défendre, … aisé à percevoir des droits de passage. Les sites des seigneuries plus modestes : Bojuste, Beizit, Coëtro, Kerlann, Trongoff répondaient à ces considérations, mais les voies modernes, dont la D19 et le pont de 1875, masquent un fait que le Cadastre de 1832 révèle ; le pont attesté en 1612 survit, Trézelen à sa sortie, le Beizit montrent encore, par la largeur de voies gallo-romaines, le trajet emprunté par certains pélerins de Saint-Jacques de Compostel ou en direction du Bourg. Par ses constructions : gués, ponts, biefs de moulin, l’Homme pour sa commodité a surmonté les obstacles.

Les noms de lieux d’origine restituent son visage à la paroisse primitive, car l’homme a emprunté au paysage ou à la vie sociale les caractéristiques qui rendaient les mots immédiatement compréhensibles et les lieux repérables.

L’ensemble de cette catégorie de noms de lieux constitue la toponymie descriptive.

 

Hydrographie, Peuplement, Toponymie

 

Le sous-sol et le sol

Lann Rohalque : les matrices cadastrales donnent en 1832, Lann Roaheque = «lande rocheuse». Tout le site est riche en roches granitiques : Roc’h, Roc’hell est un doublet de Roc’heg. Les archives des Religieux Carmes de Sainte-Anne donnent au XIVe siècle Lann Roch = «la lande du rocher», lequel pourrait être le menhir en place au dessus du Sal.

Kerroc’h domine, à l’autre extrémité de Plumergat, la rivière Le Loch et la carrière de granit ; appelé ainsi depuis que le lieu est habité, avant il était dit Lann Roch.

Rohu vient aussi du moyen breton roch, emprunté au latin rocca = «roc» ; de même que Rohello en Baden dont les seigneurs de ce nom affichaient leurs armoiries à N. D. de Gornevec, Rohiou au Faouët, Rohu à Lanester.

Grého : Graho en 1674 ; Grazo puis le Grazic en 1428 (comparer à Grayo en St-Nolff, mais Grasriou en 1514). Graz a le sens de «colline rocheuse» ou de «grée» formée de graviers. Un Ker er megrée a disparu après le XVIe siècle. Grazo, à cheval sur deux communes, culmine à hauteur du clocher de la basilique de Ste Anne d’Auray.

Ravinet dont un Parc Ravinet er grien (matrice cad. de 1832) où grien viendrait de krin = «terrain pierreux» (laissé aux moutons). Était dit Ranquiniec en 1757, Ranquinet en 1683, tous deux formés de ran = «parcelle» et de quin dérivé de kein = «dos, échine» qui appliqué au paysage correspond à «crête».

 

 

Le relief

 

L’altitude moyenne est peu élevée, mais la succession des bosses et des creux est une des caractéristiques du pays. Marécages et étangs occupent les dépressions sans traverser le granit et l’argile imperméables, les hauteurs obligent les cours d’eau à les contourner ; dans le passé, faute de drainages et d’écoulements suffisants, ces traits étaient accentués ; sont encore visibles des chemins surhaussés, près de Kerdronnet, en bas de Goh Ker, dans des zones inondables ou d’anciens marécages.

 

Les hauteurs souvent très relatives.

 

L’abondance des termes qui les désignent est significative du choix des habitations.

        Bré du vieux breton bren = «colline», Graz = «colline rocheuse», Koguen = «la butte», Lein, leign, len =     «sommet», Mené, mané = «hauteur, pente de montagne», Ros = «coteau», Uhel du v. br. et du gallois uchel = «haut»…

Bléfort : Beaufort en 1513, Breaffort au XIVe siècle, comme Breafort en Baden, Breaffort en Plumergat vient de Aforz, emprunté au vieux français «aforce», ayant le sens de «violent, fortifié». Un «retranchement élevé», francisé en «beau fort» avec maintien approché du sens.

Boceno est aussi emprunté au français «bosse», fixé en breton du vannetais dans bossenn (Cabocen en Melrand). Une bosse subsiste à l’emplacement d’une chapelle disparue, sans doute dépendante de Bojuste.

Bréarec : Bré = «mont» succède au gaulois briga. Breharrec en 1644,où le h a valeur de K qui donne karr = «charrette». Une graphie de 1643, Brehavec, suggère une autre explication : de hanvec = «pâturage d’été».

Kercoquin : Coquin avait le sens de «mendiant, gueux» aux XIe-XIIIe siècles ; il apparaît tardivement en 1756 et 1832, sans doute par erreur phonique et graphique, à la place de koguen = «butte». Les graphies sont variées dans les actes anciens :

 

Kergucu en 1662 et 1782, Kerguicu en 1772, mais le plus constant est Kercucu de 1573 à 1793. Jean-Marie Plonéis, dans "la Toponymie celtique", cite des lieux de même étymologie en Corse, Angleterre, dans le Lot et le Gard, et voit dans Kukk et son dérivé kok, une racine pré-indo-européenne.

Bien que l’emprunt d’un mot à une langue n’implique pas la présence de ceux qui la parlent, la remarque n’en est pas moins intéressante dans des lieux où les vestiges mégalithiques sont proches, dans une commune où les stèles basses de l’âge du fer sont encore nombreuses, les uns et les autres témoignant d’une occupation humaine plusieurs fois millénaire.

Kerscrap : de krap = «flanc, escarpe» venu du v. br. et du gallois crap. À rapprocher de Kerscap en Plescop.

Laymer, précédé par Leymer, Lainmer, Lenmer en 1427, où mer veut dire «grand» ; «le grand village sur la hauteur». Son vis à vis Lenignan déformation moderne de Leignelan, «le sommet de la butte», toujours aussi bien nommé. Laymer reste remarquable par la convergence des chemins.

Lein-er-lann, près de Mériadec, «le sommet du landier». Lein vient du v. br. blein = «faîte, sommet».

Legnopir, Lenoper, Leincautper en 1412 correspondait au nom du village, au pied d’un versant où poussaient des «poiriers sauvages», signification de cautper issu de kalper.

Lenones : Lenanes sur le cadastre de 1832, Lainonnes en 1679, où onn est le «frêne», dont le lieu était particulièrement fourni. Nes est en v. br. «proche, près de», donc le village «du haut près des frênes».

Mané Mevat : plus curieux pour ses caractéristiques anciennes que par sa cinquantaine de mètres d’altitude. Manémesvat en 1680, où vat, mat = «bon» ; mes a le sens de «glands» et maes en v. br. et en gallois celui de «champ ouvert, non clos», le premier sens ayant pu précéder l’autre en fonction de la déforestation puis de l’organisation agricole.

Manéglaz (ou Ménéglaz) : «hauteur verdoyante» plutôt que village dont les toitures auraient été d’«ardoise» = men glaz. Un des mots les plus stables Cosmeneglas en 1509, Menesglas en 1390, dont les faibles variations ont accompagné le renouvellement des bâtiments.

Merleign : Merlin, graphie aventureuse sur la carte IGN, mais en partie exacte. Meslin en 1524, Meslain en 1477, mêmes interprétations que celles avancées pour Manemesvat. Tous ces toponymes sont relevés des archives des Religieux Carmes de Sainte-Anne. Mêlain en 1785 montre avec l’accent circonflexe l’évolution de l’écriture.

Moten : du vieux français «motte» adopté en breton avec Mouden en toponymie pour «tertre, élévation, monticule». Variantes : vouden, Er voten vraz = «la grande motte».

Richuel : Rescuel en 1638. Nous reviendrons sur les Ris, Res, Reste. Ric ou Ris est ici «rebord», élevé selon le qualificatif huel, un plateau plus nettement discernable sur la terre du même nom vers le Rohu.

Toul Meleign : toul = «trouée, percée» dans les hauteurs ; en bordure de la voie Plumergat-Locminé, il peut être pris dans un sens figuré «ouverture vers». Voir Groez Toul en Pluneret. Il n’apparaît qu’après 1832 et peut avoir remplacé Meneglesquen, 1638 non situé.

 

 

Rivières, étangs, ruisseaux, lieux humides

Les deux rivières qui encadrent Plumergat ont des noms d’origines différentes.

Le Loch (sans appostrophe jusqu’au XVIIe siècle) Remplit plusieurs dépressions qui forment autant d’étangs, d’où son nom en v. br. loch, luh = «étang», llwch en gallois = «lac» (penser à Lochness).

 

          Les triangles noirs correspondent aux villages dont le nom ancien contient la notion de hauteur : Lain, Lein,                 Leing, Manez ou Ménez, Bré, Bosenn, Graz, scrap, kuk, Moten ou voten, huel.

          Les ronds correspondent aux villages dont le nom ancien évoque l’eau, la proximité d’un ruisseau, marais,                étang, zone humide … : Lenn, Gwarch ou Gouah, Dour, Loch, Gwern ou Huern.

            Exemple : Luzerne = Lesguern en 1522.

 

Le Sal comme il a été dit, le mot a suivi les guerriers de Clovis, c’est du francique, ayant le sens de «demeure, habitation» disposant d’une grande salle, le premier château du vieux Coëtsal ?

Le ruisseau de Cordier a connu le rouissage du chanvre jusqu’au milieu du XXe siècle.

Les ruisseaux de toute la région prennent le nom des villages qu’ils avoisinent, parfois succes-sivement ; ainsi dans les anciens documents, le ruisseau de Kersourde s’appelait de Trongoff après avoir reçu les eaux du ruisseau de ce nom, et plus bas de Pont-Normand, avant de rejoindre le ruisseau-frontière de Guersac’h et le Sal.

Le Gouah forme adoucie de gwazh = «ruisseau», du vieux breton guoaeth ® goaz en moyen breton ; le village tire son nom de la proximité du ruisseau.

Plusieurs variantes existent : Goah Kerubé en Plescop, Gouascoin en Grand-Champ, le Goahic en Pluneret, Gouaih en Landévant, Ouech dans Tal er Ouech en Cléguerec, Lan-er-Houech en Pluvigner.

Le Lenn : du v. br. lin = «plan d’eau, lac», dans une zone autrefois marécageuse.

Lennebourg : appelation oubliée, alors que l’étang près du bourg est bien présent. Bourg, adopté dans l’Europe occidentale, est d’origine germanique : burg = «lieu fortifié». Ruisseau et étang faisant partie d’un système défensif traditionnel, il paraît probable que le «vieux chastel», en ruine en 1557, les dominait à proximité immédiate.

 

Dans tout le pays bretonnant, de nombreux villages contiennent le terme guern, (verne dans le reste de la Gaule ou du vannetais) : Talverne en St-Tugdual, Penverne en Quistinic, Lann Palvern en Brec’h. Gwern = Guaern un v. br. a donné guern en m. br. et gwern en gallois, avec le double sens de «marais» et de l’arbre des marais «l’aulne» (penser à la rivière l’Aulne – 29).

 

Guernio qui domine le ruisseau de Kersourde ; on évitait de bâtir dans les creux.

Guernaüel près d’un petit étang. Guernahuel en 1832 et 1683 contient la terminaison issue de awel = «vent» ; le village a pu être édifié en bordure d’un "marais venté".

Guerneüé : neüé, variante du m. br. nevez = «neuf, nouveau», en v. br. nouid, en gallois newydd de même sens. Guernehué est une variante vannetaise à Colpo, St-Avé, Plaudren ou Guerneüé Hilary à Plumergat.

Luzerne qui mériterait qu’on corrige l’erreur de sens en lui rendant son nom d’origine Lezuerne en 1715 et Lesguern en 1522 où les (lez) signifiait «limite, en lisière», ici de la zone basse et aqueuse du Loch. Lesguern en 1415 à Merlevenez, Lesguen à Grand-Champ en 1513.

Penhuern : Pen = «pointe, extrémité» du lieu humide, à l’écoulement difficile. Le Huerne en Lignol et Tréffléan (56), verne dans Talverne en Moustoirac et St-Tugdual.

 

 

Gués, traverses, ponts, autant de passages

 

Les gués ont été les passages les plus naturels, les plus nombreux ; il n’en reste que quelques traces vers Kerroch, St-Derven … aux basses eaux.

Ce sont les toponymes en Trez, Tres, Treizh du v. br. Treth = «passage», parfois dérivés de trech (Kerentrech) ou treu qui maintiennent le souvenir des "traverses" ou voies "à travers" les ruisseaux. Joseph Loth, celtisant, les rattachait au latin trans. Ils prennent parfois le sens de «au-delà, outre».

Tréboulard : le second terme semble venir du vieux français boloart qui aux XVe et XVIe siècles désignait un «ouvrage de madriers» ou élévation de pierres, terre et madriers sur le tout pour franchir les ruisseaux ; voir Guernboulard en Pluneret et le ruisseau de Léran.

Équivalents : treuzell, treizhell, treuzadenn, roudouz

La treuzell du Moulin Danes(t) : «Passerelle». Le moulin ne présente plus que quelques ruines dans les broussailles mais la passerelle qui enjambe les rives du Loch, surélevée à l’époque moderne, reste un modèle du genre par ses assises puissantes qui ont sans doute défié les siècles.

Le Trespas "passage de Trongoff" ou de Coët Cunec (Coët Guézennec) associé à "droit de passage" est du vieux français ; le gallois treth = «taxe» présente la même évolution sémantique.

En 1541, Suzanne de Bourbon, belle-mère de François de Coligny, faisait état de ce droit au nom du seigneur supérieur du Largouët.

Ces deux passages au-dessus de l’eau ont été bien connus et utilisés par nos contemporains.

Trezelen "au delà de la rivière" après la traversée du Loch par l’ancien pont attesté en 1612. Treseren en 1542, Trezerouen en 1586, la terminaison roen contient la notion de «lignée, parentage, noblesse» en v. br. … Quenquiseren Lignol en 1414. Les actes d’état civil du XXe siècle à Brech désignaient par Treserin ce village ; une voie gallo-romaine, un réseau de chemins, un four monumental, laissent soupçonner une importance révolue et évoquent un trajet possible pour des pélerins venus d’au-delà la chapelle St-Jacques … et allant vers Compostelle.

Treuroux, Treulan se rattachent sans doute à "passage" mais treu est équivoque car il peut venir de tnou, thenou = «vallée» en v. br. ® Tron, Traon, Treu. Ainsi, Thnouengoff en 1427 a évolué en Trongoff, et Thnousal en Plougoumelen a donné Treusal. La connais-sance du nom ancien est nécessaire pour trancher.

 

 

Ponts et moulins

 

Pont, adopté aussi bien en langue française que bretonne et galloise, vient du latin pontem.

Il prend souvent le nom du village qu’il dessert : pont de Kerjegu, du Clud, de Kerguillay (Langroës) avant d’être le Pont Neuf, parfois celui du bourg proche : Brech. L’étymologie de quelques autres est moins évidente.

Pontarff : Pont-er-tarff au XVe siècle ; tarff = «taureau» en gaulois.

Pont Gollec actuel, Pont Collezec au XVIe siècle, du v. br. Coletoc = «chéri» attesté en 868 ; c’était le surnom de St Qué, patron de Querrien (29). Quenquis Collezec en 1640 dans l’aveu de Hierosme de Botderu à Jean de Rieux, seigneur du Largouët.

Pont-er-Hroah (IGN), Groah (localement), écrit groach dans le Catholicon de 1464, en gallois gwrach = «vieille femme, sorcière», qui peut dater aussi bien du haut-moyen-âge où plusieurs connurent un triste sort que de l’époque celtique dont la tradition considérait le bon côté d’une "fée bienfaisante" ou le mauvais d’une "sorcière" experte en maléfices. Quernegrouach en Langoëlan, Kerhouah en Bubry, Languidic.

Pont Normand : les documents anciens manquent pour y reconnaître Nord-man (homme du Nord), Viking ; un Park Norman à Locoal-Mendon peut contribuer à accepter ce sens.

 

Les moulins ont participé à la facilité des passages par leurs barrages de retenue des eaux, biefs ou ponts, mais les gués ou traverses étaient généralement antérieurs aux constructions, à Bojuste (Guého) et Treuroux en particulier.

Moulin de Kerlann appelé Moulin Souzain ou Souzan en 1438 (A.D.M. 48H/9), mot venu du Moyen-Orient : shushan = «lys» par le grec sousanna. Kersulan en Bieuzy (Kershusan en 1427), Suscinio en Sarzeau ( ?) (Succenio en 1238), soumis à la réflexion par A. Deshayes. Plusieurs Kersusan, comme nom de famille, se rencontrent dans la proche région. Il a pu être fixé à Plumergat à l’époque de l’évêque de Vannes Susan(nus) théologien de renom au IXe siècle (Le Mené).

Moulin Danet(s) et moulin Guého ont pris le nom de leurs propriétaires, nobles gens du Vannetais.

Moulin Conan et étang, partagés entre Jacques et Anne Rouxel dame du "Bezy" en 1543 ; Jan du Rohello, époux d’Anne, le confirmait en 1545. L’acte d’acquêt du 24-05-1501 précisait "la moitié du moulin Connan". Le partage visible de l’étang, correspond à la frontière de deux paroisses. Conan, attesté en 832 est un diminutif du v. br. con = «chien, guerrier, loup» ; le nom a été porté par 4 Ducs de Bretagne, dont Conan Ier duc en 958, décédé en 992.

 

 

 

  Le thème de la végétation

Dans la présentation des toponymes de cette étude, nous trouverons évoqués l’arbre en général, le bois ou bosquet (coët), la lande (lann), également termes généraux qui impo-saient un mot associé pour qu’on puisse identifier et localiser l’endroit dont on parlait.

Certains de ces mots associés sont apparus déjà dans les thèmes précédents : noms de personnes, repères géographiques, historiques … On se contentera de les rappeler afin de mieux comprendre l’importance que donnaient de lointains ancêtres aux noms en relation avec les plantes, tels l’aulne, le buis, le chêne, le frêne, le genêt, le hêtre, le laurier, le poirier sauvage, le saule, le sureau.

Tous ces mots, sauf la chesnaye, ont été précédés des termes originels qu’utilisaient les Gaulois, Bretons ou Latins ; leur étymologie est précisément le but de la recherche en toponymie. On verra qu’elle aboutit parfois à des hypothèses différentes donc incertaines.

  L’arbre

Gwez et son dérivé gwezenneg = «lieu couvert d’arbres», du vieux breton gwid, gwydd en gallois, puis guez en moyen breton, (en abrégé m. br. du XIe au XVIIe siècle) et vieux breton (v. br. avant le XIe siècle).

Penher er Huéen (carte IGN – 1986). Huéen, huen dans les textes anciens sont des transcriptions de gwez qui soulignent à nouveau le décalage entre breton parlé et breton écrit. Penher est aussi un terme évolué, ayant le sens de penker = «lieu isolé, un écart» ; on peut donc proposer "l’endroit isolé au milieu des arbres".

Le bois

Coët en m. br., ou koed, venu du v. br. coit ; certains auteurs apparentent le terme au gaulois caito, ceto. Rappelons Coetro, Coetsal et Coet-Cunec.

Coet-Cunec : Coet Guezennec en 1427, mais le pléonasme "bois boisé" paraissant suspect, l’interprétation par "bois Guethenoc" semblait préférable, surtout en fonction de la qualité «combattant, combatif» attachée au nom de la personne et pouvant caractériser un des premiers défricheurs ou tenanciers, mais peut-être s’appelait-il Guézennec ?

Coedigo, Coetdic est "petit bois", mais Coedigo admet plusieurs sens :

- à partir de dig = «zélé, exact» (Kerdigo en Larré et Plumelin – 56),

- issu du v. br. dic, avec un diminutif digo, qui se comprend comme trait de «caractère entier».

Michel Piriac, auteur du Dictionnaire toponymique du Centre-Ouest Bretagne suggère "le bois d’un voisin peu commode". On trouve Coet-Igo en Surzur, Coadigou en Guilligomarc’h.

Coet-Jégu, Coit-Jagu en 1427, du nom de Jacobus en latin, venu de Jacob. Ce nom biblique revêt le qualificatif de «dominateur, qui supplante», tout à fait applicable à un petit seigneur local ou un riche propriétaire du Haut Moyen Âge (de Bois Jagu est un patronyme dans un département voisin). À rapprocher de Keryacob à Bannalec, Ville Jacob à Nivillac.

Coet-Noc : noch, hoc’h, en gallois hwh = «le porc», mots venus du v. br. hoch, (Kerhoh en Baud, Languidic, Melrand). Dans plusieurs communes, la chasse au sanglier est dite encore "chasse au porc", sous-entendu sauvage.

 

La lande

            Lann est un des termes les plus fréquents de la toponymie bretonne. Lann Coëtdigo est la zone du village du même nom. Rappel : Lann Dourel, Lann er Hias, Lann Rohalque, Lein er Lann.

Toul Lann ayant été classé avec les noms d’hommes puisqu’il était Toul Allan en 1446 (Louis Galles). Toul Lann de Plougoumelen et Muzillac renvoient à «trouée, entrée». Toul Allan en Plumergat par l’importance des nobles qui s’y trouvaient aux XVe-XVIe siècles, suggère l’entrée contrôlée vers Pluneret, Brech et Laimer. Même origine des mots à Toul-Lann en Riantec, même évolution et châteaux.

Lann er marh : mar = «sorbier» à Bieuzy, mais la lettre h terminale correspond à c’h.

Marc’h = «cheval, étalon» en v. br. et en gallois, marc en irlandais. Coët er Marc en 1870 à Quistinic, Lairmarh à Baden, Parmarh à Inguiniel.

Lann Poulgat : gat = «lièvre» et poul = «étendue d’eau» parfois «trou», donc la "lande de la mare au lièvre". Stang-er-Gad en Pluméliau, Poulga en Carnac.

Langroez : le sens religieux nous a semblé prévaloir sur "lande et croisement de routes". L’étymologie en langue bretonne va dans ce sens, Lan viendrait de glan = «pur, saint» ; la sainte croix ou la vraie Croix – er hlan groez a subi une mutation qui en breton parlé courant a abouti à Langroez (Job Jaffré). Il y a de nombreux lieux nommés Vraie Croix ou Langroez dans le Morbihan, souvent liés à des sanctuaires dus aux Chevaliers de la Croix : les Hospitaliers de St Jean de Jérusalem, puis de Malte.

Remarquons en outre que le nom ancien du village Kerguillay est venu d’un Killae «attesté vers 1009, formé de lae = «fidèle, croyant» (A. Deshayes).

 

 

Le chêne

        Derw, comme en gallois, est issu du v. br. daeru puis en m. br. deru. Bien qu’il reste une espèce essentielle de la commune avec des représentants séculaires, le terme d’origine n’apparaît pas directement dans les noms de lieux. Il est contenu par contre dans le patronyme des seigneurs de Botderu qui ont eu d’importants membres à Plumergat, notamment à Trongoff.

La Chesnaie – chênaie, ancien français rencontré en 1211 en littérature ; la forêt avec prédominance des chênes étant lieu de vie possible pour l’homme préhistorique chasseur-cueilleur. La déforestation accomplie dès le début du Néolithique s’est poursuivie jusqu’à nos jours en laissant dans les noms de lieux le souvenir des origines. Dans les anciens textes, deux chesnaies sont citées, l’une au Nord-Est du bourg, l’autre au Nord de Bojust, qui n’en faisaient qu’une dans la forêt primaire.

L’aulne

Gwern a aussi le sens de «marais». Rappel des villages proches (ou en surplomb) des lieux humides et des aulnes : Guernauël, Guerneuë, Guernio, Luzerne (Lesguern en 1522), Penhuen.

Le buis

Baizi. Le dictionnaire d’Henri Goelzer (Flammarion éditions) qui contient les mots latins des origines à l’époque carolingienne donne la même signification à buxus et buxetum, «le buis» dont les dérivés ont pu évoluer en Baizy, Beizit, Veizit d’une part et en Busit, v. br., et son équivalent français «la Boissière».

A l’appui du 1er sens, ceux de Plumergat, Brech, pour lesquels la proximité des voies romaines renforce l’hypothèse plausible de l’introduction du buis par les Romains et de la pérennité du nom des lieux.

       Le frêne

Onn, onnen, Lenonès en Plumergat, Kernonnen en Moustoir-ac, Noneno en Cléguer (56).

Nénec à Melrand correspond à «la Fresnaie».

Le genêt

            Banal précédé par banadl en v. br. et gallois, qui a donné balazn en m. br. tardif et qu’on suppose tous issus du gaulois banatlo.

Benalo en Plumergat, Bonalo en Arzano, Bellano en Theix. Banaleg avec sa terminaison significative d’ensemble, collection, correspond à «genêtière», Bannalec (29), Bonalec en Camors, Benalec en Bieuzy-Lanvaux.

Kervallé, citons l’extrait de la Réformation de 1427 (R. de Laigue) : «l’hébergement de Kerballay dit du Juclut, au sieur de la Forêt» évolution tardive qui rappelle les «balais» … en genêt. Dans Juclut, on reconnaît Le Clud, précédé du Ju qu’on relie à Guen = «cuvette tourbeuse en hauteur». Jun dans Penajun en Guiscriff, Le Yün en Langonnet (56).

Le hêtre

        Faou, Le Faouet, Fauouet en 1398 à Plumergat. Terme qui évolue en fonction du déboise-ment pour se réduire en Faouedic (1830), diminutif comme à Ploemeur (actuellement en Lorient) ou à Glomel (22).

Du fait de la confusion V et U, le sens du latin faverer = «se réfugier» a été donné au mot favouet par Dom Lobineau.

Le laurier

Lore du latin laurus, puis v. br. Laur.

Botloré à Plumergat, Botloré en Arradon et à St Avé en 1448, ont le même sens : «résidence au laurier».

Le poirier sauvage

Kozhper et Kalper, le fruit (petite poire de 2 à 3 cm, propre à donner de l’eau de vie), était appelée localement pir segal = «poire de seigle». Villages : Légnopir, Leincautper en 1412.

Coperit bihan et Coperit braz correspondent à «lieux plantés de poiriers sauvages», Cautperit en 1413. Coperit à Grand-Champ. Toutes ces appellations contiennent le radical per ou pir du latin pirum = «poire» (penser à piriforme), piracium étant la boisson dite «poiré». L’espèce est en voie de disparition.

Le saule

Haleg, helyg en gallois. Halegid étant «la saulaie» : Helleguy en Bubry, Melrand et Quistinic.

Menilhalec : Menil est une forme contractée de minic’hi, du v. br. minihi, emprunté au latin monachia = «zone de franchise d’un monastère ou ermitage». Le m. br. minihy a pris le sens de «maison de refuge». Dans une zone de marais et de saules s’exerçait-il un droit d’asile, le sauvetage des pourchassés ? ou plus simplement, le lieu n’était-il pas favorable à une cache ?

 

Le sureau

Scau en v. br., ysgaw en gallois.

Botscav en Plumergat, Botscave en Grand-Champ et Inguiniel, devenu Scaouit au Bono (56), Bod-Scaü à Lomener en Ploemeur. Appliqué aux arbustes et arbres, bod avait le sens de «touffe, buisson». A partir de l’époque où le lieu était habité et qu’on situe au cours du Haut-Moyen-Âge, bod ou bot prenait le sens de «demeure ou résidence».

Pour conclure, évoquons les efforts de ceux qui pendant des millénaires ont travaillé au défrichement des forêts, pour donner à Plumergat son visage agricole : les bûcherons.

Koader, dérivé de koad ou coët, comme coediwr en gallois = «bûcheron», il se maintient sous la forme évoluée Parc er Scouder en Mériadec.

N’oublions pas pour autant le repos et les loisirs, les Rest, résidences de détente, mais aussi Deduy, connu au XIe siècle au sens du vieux français «passer, flâner, se divertir» employé par le duc Jean Ier le Roux au XIIIe siècle quand il préparait sa «maison deduy» où il inviterait des compagnons de chasse : le château de Suscinio. L’équivalent breton est Dudi.

 

 

«Faux amis», mystères, complément

Les «faux amis»

Dans l’apprentissage des langues étrangères, les élèves rencontrent des termes qualifiés de «faux amis», car s’ils sont identiques aux mots français ou en sont très proches, ils ont un sens différent. Les noms de lieux bretons ont aussi leurs «faux amis».

Luzerne : certes le mot actuel est très clair, la légumineuse est connue de tous, mais si l’on cherche l’origine du nom du village, il est inadapté. Lesguern en 1522 était au contraire adapté au lieu : Les ou lez = «à proximité» et guern = «marais ou lieu humide» (ou «aulne» arbre des terrains arrosés ou inondés), en surplomb de la rivière Le Sal. On a de même, Luzerne en Merlevenez, en bordure du ruisseau de Pont-Coët (56).

Castel : on pense aussitôt à «château», il n’y en a jamais eu, contrairement à celui attesté dans les actes anciens à Lennebourg : près du bourg et de l’étang, contrôlant le passage du Pont Golec (Collezec en 1418).

La déformation du mot est relativement récente, puique le cadastre de 1832 mentionne Custel, dont la racine cuz ou kus, signifiait en m. br. du XIe siècle «caché», à l’abri des regards. Voir Le Cuz en Querrien.

Boisguy a revêtu des formes diverses mais jamais coet, koed ou coat, fréquents par ailleurs, signifiant «bois». Le premier composant de Boisguy est une attraction par le français d’un précédent bod = «demeure, résidence», en v. br. d’avant le XIe siècle.

La terminaison Guy n’offre pas d’exemple avec le sens de prénom en toponymie bretonne. Il faut remonter à un mot contemporain de bod pour comprendre le nom du village : c’est giv le plus plausible (gwydd en gallois) dont Joseph Loth voit l’origine dans uuid = «qui est en vue de» en vieil armoricain. Un très ancien Bodgiv ainsi reconstitué localisait des «demeures bien en vue», au dessus de la vallée du ruisseau de Kersourde, dit Pont Normand en aval.

Bois juste si l’on admet comme dans le cas qui précède la déformation de bod en bois sous l’influence du français, on revient à bod = «résidence, demeure». L’histoire montre l’évolution du toponyme depuis Boeiust en 1391, Boyust en 1425, Bojuste au XVIIe siècle, et nous révèle l’importance d’une seigneurie exerçant la justice, dotée d’une armoirie «d’azur à l’ours passant d’hermines», symbole de puissance. Just ou iust est un nom de baptême, venant du latin Iustus, diminutif de Iustanus «juste, intègre», qui nous fait revenir à l’occupation romaine et aux puissants successeurs dotés des mêmes pouvoirs dans la "demeure ou Cour de Justice" au XVIe siècle : les seigneurs du Garo.

Saint-Just en Bignan et la Vraie-Croix, Kerjust en Kervignac.

Kercoquin : rappelons ce «faux ami» parvenu à nous sous cette forme fautive, induite par Kercoquen de koguen = «butte» en breton ; avant 1793 : Kercucu dérivé de kuk, une racine pré-indo-européenne d’avant les celtes … mais qui a pu immigrer avec eux.

Lann Dourel : ici, ce sont les bretonnants qui peuvent être induits en erreur par la racine dour en moyen breton «eau, ruisseau» ; dans la région vannetaise , ce sens se vérifie en deur, Pouldeur en Plumelin, Touldeur en Rumengol … Dourel vient plus probablement de tour ; on le retrouve en Saint-Méen, écrit Tourel en 1690, en Pluméliau écrit Tourello.

Lan Dourel en Plumergat peut correspondre à une propriété noble ou religieuse (lann = «lieu sacré») du Haut Moyen-Âge, avec une tour de contrôle à l’intersection des voies Pluvigner-Auray par Kerguillay (l’actuel Langroez) et Saint Dégan – Mériadec – Vannes, la voie romaine.

rédoué : la tentation est grande de trouver doué = «dieu», païen ou non, qui a effectivement ce sens dans le langage moyen breton du XIe siècle et moderne. Tré serait alors un raccourci du v. br. treb = «tribu ou groupe», et Trédoué aurait été à l’origine nommé par un «peuple de Dieu».

Or, c’est le second terme qui a évolué dans sa graphie : Trehedouez en 1682 (hed = «essaim», douez = «dense»). Diverses interprétations sont possibles dont un village très peuplé et affairé. Un auteur a suggéré «douves» dans Doué en Guer.

 

 

La persistance du mystère

Hoetdin : non seulement le nom est oublié depuis fort longtemps, mais on ne sait où situer le lieu qui le désignait, pourtant important puisqu’il se rapportait au «bois de la forteresse», ou colline fortifiée. C’est un acte de 1391 qui le mentionne dans le fonds des Religieux Carmes de Ste Anne (en 43H1-2G) avec l’indication "près de Lanhauper" (Legnopir). Au sud de Ringablac’h, un bois dominant montre quelques talus peu significatifs.

Kerdalibot : Dalibot est un nom toujours porté dans les Côtes d’Armor. En 1599, Julien Bino, sieur du Coëtro faisait aveu à Guy de Laval, seigneur supérieur du Largouet, de ses possessions dont Thalebot (E2671). On trouve aussi Talbot en 1544. Tal a le sens de «front» (en bordure dominante), mais la signification de dalibot, patronyme ou toponyme, est incertaine. On avance avec réserve ribot ® libot = «baratte».

Ringablac’h, (carte IGN) avec de nombreuses variations au cours des siècles : Rangablach en 1766 (B2036), Ragablaz en 1630 (43H2) et plus ancien, Rangablach en 1418. Ran, rin, rann équivalent tous trois à «portion, partie de, parcelle».

Les hypothèses de Fleuriot, J.M. Ploneïs et autres érudits sont divergentes, mais non contradictoires : «enfourchure, arpentage, glabre, dénudé», qui pourraient correspondre à la mise en valeur d’un morceau de la paroisse jusqu’alors inculte. Un texte de 1513 donnait "Ringamblac (près de la lande Gentil) en Ploezmargat". Gentil est un nom de famille, trouvé dans un acte de vente à Auray au XVIIIe siècle ; en français du XIe siècle, il qualifiait une personne "noble" (gentille dame).

Rangablac’h et Kerblouch en Pont-Scorff ont en commun l’étendue d’un plateau, mais si le relief n’a pas changé, le paysage, lui, n’était pas le même lors des défrichements ; la solution dépend de la découverte d’un texte explicite.

 

Les lieux anciens

Ce sont les Goh ou Coz = «vieux», qualificatifs appliqués à des villages disparus que les actuels ont remplacés, le plus souvent avec les mêmes pierres. Il en est ainsi des deux Goh Ker de Plumergat, dont le plus proche de Brec’h a livré des vestiges romains avec la statuette d’un Apollon, donnée au Musée de Rennes.

Coz ilis ou Goh ilis = «vieille église» dont il ne reste plus rien, en bordure de la voie reliant le bourg à Brandivy, sur un site dominant.

Cozmenglas de 1403 à 1509 (43H1/2K) entre Menezglas en 1390 (43H1/38) et à nouveau Meneglaz = «hauteur verdoyante», variations entraînées par les reconstructions des bâtiments.

Goh Rest : les Rest déjà abordés étaient des lieux de repos, en quelque sorte «maisons de campagne», mais le sens a évolué en un terme plus général «demeure». Vieux Chastel près le bourg, en ruine en 1557 (A.D.M. 43H4).

Mots liés à l’agriculture et l’élevage

Lascoher : ici aussi les documents font défaut pour affirmer que le mot dérive du moyen breton kouer = «paysan» ; c’est cependant l’interprétation la plus probable. Las, venu du moyen breton laz, se rencontre à Arzano, dans Lazen en Baden, Lazan en Langoelan ; il signifie «latte» ou «baguette» et correspond à l’habitation de nos paysans ou à l’instrument utilisé pour diriger leur bétail pour des éleveurs ?

Lezénannec à la limite de la paroisse, d’où lez = «bord, lisière».

Kernannec en Pluneret et Ploeren, Kernanec en Brec’h, écrits selon la prononciation locale d’un naoneg = «qui a faim, qui crie famine». La définition «les affamés» m’a été donnée par une aimable demoiselle qui, petite fille, avait eu la bonne idée d’interroger sa grand-mère.

Guiniel près de Ravinet, identique au gallois gwynol = «douloureux, envieux, passionné».

Kerguiniel en Languidic, Kerviniec en Camors et Le Palais. Une habitation dans une humidité permanente faute d’écoulement, abandonnée au XXe siècle par deux nonagé-naires. C’est aussi la zone à l’ouest, maintenant drainée et mise en valeur. Ces noms sont significatifs des difficultés rencontrées par les laboureurs de terre jusqu’à la seconde guerre mondiale et révèlent leurs sentiments.

Penser aussi à Locmaria er fanc = «le fangeux» et à Ravinet er grien = «le pierreux».

Nerhouet, Nerhouit – cadastre de 1832, le Lervoyt en 1390, venus de Erw = «petit champ» de 10 à 12 sillons, du v. br. eru avec ce même sens retrouvé en gallois dans la mesure de superficie erw = «l’acre». Voir Nervouëdic en Berné, Nervouidic en Ploeren.

Les terrains qui évoquent «le pré» comme Prad, emprunté au latin pratum.

Pradic avec le diminutif en –ic. Pratel viendrait du vieux français «pâtis».

Keredo comporte la racine ed = «blé», connue en moyen breton et en gallois yt. Voir Nedo en Plaudren en 1427.

D’autres villages ont dû beaucoup débrousailler, tel Kerdrain (Kerain), de drein = «épines». Kerdrein en 1602 : de même Kerdrain en Ste Hélène sur Mer (56). À Pluvigner, Le Drenec = «lieu épineux».

Kerego présentait d’importantes surfaces, de ec’hon = «vaste». Alors que Nines, dont l’origine est enes = soit «île», soit «lieu isolé, écart», en avait de réduites ; Ninis en Plescop et Ploeren.

Tredazo : on s’aidait avec des ânes = asen comme en gallois, emprunté au latin asinus.

Pont er ezen, trouvé à Plumergat, comme à Brest, Pont Nézen en Plumelin, Minazen à Languidic.

Lann er marh, du v. br. marc’h = «cheval», sans doute élevait-on des étalons ?

Kerdronnet. A. Deshayes estime que la prononciation cornouaillaise : [dreon] s’est inscrite dans le mot a-dreñv = «derrière». Derrière quoi ? Sans nul doute la propriété du Baisy, dont le village était une métairie, ainsi que Titro, lesquels ne se sont détachés que par une vente volontaire des propriétaires après la Révolution.

Nevidit, Nevedit, issu de newez = «nouveau», c’est-à-dire mis nouvellement en culture.

 

  CONCLUSION

 

Le lecteur aura trouvé dans ces pages une rétrospective de l’action des hommes qui a pris effet quand ils se sont fixés sur des sites qui pouvaient leur assurer la nourriture et l’abri. Depuis le Néolithique et jusqu’à nos jours, ils auront dû maîtriser une nature sauvage, accepter une organisation sociale qui, à l’origine, assurait leur sécurité, protégeait leurs familles et leurs droits, trouver dans la Religion la consolation et l’espoir d’une vie meilleure.

Tous les mots qu’ils ont laissés dans l’appelation des villages reflètent leurs actions et le souvenir des gens qui ont pu marquer leurs vies ; c’est l’objet même de la toponymie : rendre aux noms de lieux anciens leur pouvoir d’évocation, en cela leur intérêt culturel est irremplaçable.